Kenneth Gilbert - Le Livre d’Orgue de Montréal (full album)
“En 1978 fut mis au jour, à Montréal, le plus volumineux manuscrit de musique d’orgue française de l’époque de Louis XIV à nous être parvenu. Ce précieux document fut apporté en Nouvelle-France en 1724 par Jean Girard, clerc sulpicien originaire de Bourges et organiste à Notre-Dame de Montréal jusqu’à sa mort en 1765.
Le manuscrit fut appelé « Livre d’orgue de Montréal » par la musicologue Élisabeth Gallat-Morin, qui en fit la découverte, et Kenneth Gilbert, qui en donna la première exécution publique au XXe siècle.
Jean Girard (1696-1765), à qui nous devons la survie du manuscrit, semble avoir été le premier musicien de métier que Montréal ait connu. Clerc tonsuré, il avait reçu une formation musicale complète à la maîtrise de la Sainte-Chapelle de Bourges, avant de se préparer, chez les Sulpiciens de Paris, à tenir l’orgue à Montréal, ce qu’il fit pendant quarante ans, tout en enseignant à la petite école des garçons. Il n’est pas, toutefois, le compositeur de la musique du manuscrit: non seulement n’y trouve-t-on aucun exemple de sa graphie, mais aussi le style de la musique, de la fin du XVIIe siècle, ainsi que l’aspect matériel du document indiquent plutôt que c’est un volume déjà complet et relié qu’on a remis au jeune organiste qui partait pour le Nouveau-Monde.
Un certain mystère continue d’entourer ce manuscrit de 540 pages, dans lequel on ne retrouve aucun nom de compositeur. L’étude poussée du document a révélé un lien avec l’un des quatre organistes du roi, Nicolas Lebègue (1630-1702), dont le manuscrit renferme seize pièces (quinze qui figurent, parfois avec des variantes, dans ses trois Livres d’orgue publiés, en plus d’une seizième qui ne se retrouve que dans un manuscrit contemporain de la Bibliothèque nationale à Paris (Vm ). En outre, les nombreuses ressemblances qu’offrent les pièces anonymes avec la musique de Lebègue rattachent le manuscrit à l’école de ce célèbre compositeur et pédagogue, dont le rayonnement était considérable; d’ailleurs il n’est pas interdit de penser que le Livre d’orgue de Montréal renferme des pièces inédites de sa main.
Composé en majeure partie de versets pour le Magnificat, le manuscrit comprend, entre autres, six Messes, un Pange lingua, et trois Te Deum. Les versets d’orgue du répertoire français des XVIIe et XVIIIe siècles sont relativement courts, étant destinés à alterner avec les versets des Messes ou des hymnes qui étaient chantés; ainsi l’orgue remplaçait un verset sur deux. Autre particularité de la musique d’orgue française de cette époque: les diverses pièces étaient pensées pour une couleur sonore particulière, la registration se confondant souvent avec le titre de la pièce. L’orgue Wolff, dont la traction suspendue, le vent flexible, l’harmonisation et l’accord selon d’Alembert se conforment à ceux de l’orgue classique français, restitue l’ambiance sonore dans lequel a été conçu le Livre d’orgue de Montréal, avec son Plein Jeu typique, son Grand Jeu d’anches, ses Jeux de Tierce et ses jeux solistes.“ - Élisabeth Gallat-Morin, Ph. D. Musicologue
Source : Analektra -
Tracklist :
Recorded at Redpath Hall of McGill University in February 1983.
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