Le père donne le ton, le fils prend la partie solo. À Lausanne, deux stars sont réunies sur scène et il se trouve qu’elles sont de la même famille. Jean-Jacques Kantorow, qui dirige l’Orchestre de Chambre de Lausanne, ouvre la soirée avec la “Symphonie n° 2“ de Camille Saint-Saëns. Puis, Alexandre Kantorow le rejoint pour interpréter le “Concerto pour piano n° 2“ de Johannes Brahms.
Les Kantorow, père et fils, sont réunis sur la scène du Métropole de Lausanne pour interpréter l’une des pépites du répertoire du XIXe siècle : Alexandre Kantorow joue, sous la baguette de son père Jean-Jacques et en compagnie de l’Orchestre de Chambre de Lausanne, le deuxième concerto pour piano de Johannes Brahms.
1878, c’est l’année où Johannes Brahms s’attèle à la composition d’un deuxième concerto pour piano, projet longtemps repoussé. S’il débute avec énergie, il faudra au musicien près de trois ans d’intense labeur pour mener à bien sa partition. L’œuvre ne sera ainsi créée qu’en novembre 1881 à Budapest, le compositeur jouant alors la partie de piano. Contrairement au premier qui – plus de vingt ans auparavant – avait interloqué les spectateurs, saisis par sa véhémence tragique, ce second ouvrage est reçu avec un vif enthousiasme par le public hongrois. La pièce trouve rapidement les faveurs des mélomanes et le succès permet à Brahms de redonner immédiatement le concerto dans plusieurs villes importantes, en Allemagne, en Suisse et en Autriche.
En quatre vastes mouvements, ce concerto est l’un des plus grands de Brahms, par sa qualité musicale évidemment mais, plus prosaïquement et au sens propre, par ses dimensions. D’une durée approchant l’heure, il se révèle proprement monumental. C’est le cor – instrument romantique par excellence – qui ouvre la partition, avec un lumineux et poétique appel ascendant, que ponctuent de délicats arpèges du piano, en écho. L’orchestre entre ensuite, reprenant le tendre motif des cors que le soliste interrompt par une cadence inattendue et virtuose, d’allure quelque peu frénétique. Ces mesures inaugurales donnent le ton : le premier mouvement oscillera sans cesse entre douceur et élan, entre intimité et éclat – mais, toujours, avec équilibre. Le deuxième mouvement – “un tout petit, petit scherzo“, dira Brahms – est en réalité le plus tumultueux et le plus sombre des quatre mouvements. Noté Allegro appassionato, il tremble de bout en bout d’une passion frémissante et file sans pause, orchestre et piano s’entraînant mutuellement dans une course éperdue. Le mouvement lent – Andante – prend l’allure méditative et douce d’un nocturne orchestral et tire toute sa matière de la merveilleuse phrase introductive attribuée au violoncelle solo. Ce motif, ensuite repris par les violons puis amplifié par le piano, gouverne tout et suspend momentanément le cours ordinaire du temps. Brahms, d’ailleurs, en reprendra la mélodie dans un de ses lieder les plus intimes, Immer leiser wird mein Schlummer. Enfin, après ce repli rêveur, le rondo conclusif – Allegretto grazioso – croise deux thèmes, l’un vigoureux et dansant, l’autre langoureux, teinté de ces couleurs tziganes chères au compositeur. D’une main très sûre, Brahms les entremêle, créant un enthousiasmant crescendo progressif dont l’aboutissement mène à son terme ce prodigieux concerto.
Programme :
Camille Saint-Saëns : Symphonie n° 2 en la mineur, op. 55
1. allegro marcato
2. adagio
3. scherzo presto
4. prestissimo
Johannes Brahms : Concerto pour piano et orchestre n° 2 en si bémol majeur, op. 83
1. allegro non troppo
2. allegro appassionato
3. andante
4. allegretto grazioso
Filmé le 2 mai 2024 à la Salle Métropole de Lausanne, Suisse.
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